Fever Ray - Plunge

Chronique : Antoine Morin


Si vous vous souvenez avoir entendu le nom Fever Ray quelque part, vous vous demandez probablement à quand remonte le dernier album avec cette signature? La réponse : huit ans. Huit longues années se sont écoulées depuis le premier et unique opus de la carrière solo de Karin Dreijer Andersson, publié en 2009 et intitulé simplement Fever Ray. Cet album avait eu un succès retentissant à travers la planète, permettant à Fever Ray d’être la tête d’affiche des plus grands festivals du monde, que ce soit Way Out West ou Coachella. Si vous ne connaissez pas Karin Dreijer Andersson, un peu de son historique serait bénéfique, puisqu’il s’agit d’un des noms majeurs de la scène musicale suédoise, malgré le fait qu’on ne voit jamais son visage ou celui de son frère Olof depuis environ 2003, alors que leur groupe culte The Knife débutait son ascension fulgurante. Bien avant cela par contre, Karin était, dans la deuxième moitié de la décennie 90, chanteuse dans le groupe Honey Is Cool, dont un certain Håkan Hellström faisait également partie. C’est cependant avec The Knife et son label Rabid Records que Dreijer Andersson a connu le plus de succès, notamment avec l’album Silent Shout de 2006, qui fut maintes fois primés, et également l’introduction à la scène musicale au groupe First Aid Kit en 2008. The Knife ayant annoncé la fin de leurs activités après l’album et la tournée de Shaking the Habitual de 2013, un retour de Fever Ray semblait être la suite logique pour plusieurs amateurs du groupe, et il a fallu attendre jusqu’à cette année, en 2017, pour entendre le résultat.

Fort différent tout de même du premier album de Fever Ray, qui présentait du fin dark downtempo ambiant, Plunge semble être plus la continuité de The Knife et Shaking the Habitual. Certains morceaux partagent cependant des sonorités avec le premier opus, notamment dans les synthétiseurs et percussions utilisés, mais on y retrouve un son beaucoup plus kitsch, et largement plus upbeat. En plus, Karin conserve les textes engagés et tranchants de 2013, toujours fortement inspirés de la culture queer, pour un style souvent qualifié de queerpop. On peut finalement y entendre onze chansons toujours dominées par la voix hors du commun, parfois même inquiétante et dotée d’un fort accent de Karin et un genre électronique peu commun sur la scène pop, qui est intensément fascinant pour une femme aujourd’hui âgée de 42 ans. Voici donc une preuve qu’on n’est jamais trop vieux pour repousser les frontières du possible en musique.
 

Chanson Hit : To The Moon And Back
Des arpèges enflammés et modulés à souhait et des paroles défiant les conventions du politiquement correct, voilà ce que Fever Ray nous offre avec To The Moon And Back. La chanson a bénéficié de plus de temps que les autres pour être connue, elle qui est le premier single tiré de l’album qui a été publié. Une aventure incomparable nous attend à chaque écoute et les fans de longue date sont les premiers en mesure de l’apprécier à sa juste valeur.
 

Maillon Fort : Mama’s Hand
Le dernier morceau de l’album hérite de ce titre, pour une rare fois. Mama’s Hand est un impressionnant hybride de trip-hop et de trance, offrant des sons qui sont à la fois nouveaux et typiques de Fever Ray. Au final, c’est donc un bon cinq minutes à savourer avec des sentiments ambigus, exigus et toujours déstabilisants.

Coup de Cœur : Mustn’t Hurry
Mustn’t Hurry, c’est la chanson qui se rapproche le plus du premier album de Fever Ray, et c’est finalement la principale raison pourquoi il s’agit de mon coup de cœur. Un beau dark ambient pop, qui surprend et perdure à travers le temps. J’apprécie encore et toujours le premier album comme s’il venait de sortir, et Mustn’t Hurry pourrait en être la suite logique, beaucoup plus conservatrice que les autres. Mais, je suis certain qu’avec plusieurs autres écoutes, ma chanson coup de cœur variera, tout comme pour tout ce que Fever Ray a fait auparavant.
 
 

Fever Ray

Fever Ray, c’est l’alter-ego et projet solo de Karin Dreijer Andersson, membre du défunt groupe The Knife.

Elle est un des grands noms de la musique suédoise, ayant gagné de multiples prix et été la mentor du duo First Aid Kit par son label Rabid Records.

Figure de proue de la musique électronique downtempo, Karin Dreijer est une artiste engagée et surtout avant-gardiste en activité depuis la fin des années 1990.